Compléments alimentaires : Le mieux est-il l’ennemi du bien ?

En trente ans, notre alimentation a changé. Plus riche en graisses et en sucres, elle s’est appauvrie en nutriments et vitamines. Alors  la tentation d’avoir recours aux compléments alimentaires est grande.

Nos repas ne couvrent plus l’ensemble de nos besoins journaliers. C’est pourquoi le recours aux compléments alimentaires est de plus en plus courant. En témoignent les ventes qui ont progressé de 20 % en trois ans en France. Mais quels sont leurs véritables effets ? Sont-ils adaptés à tous les consommateurs ? Peuvent-ils être pris sans avis médical ? Réponses avec le Dr Didier Chos, de l’Institut Européen de Diététique et de Micronutrition (IEDM)

Aujourd’hui, manger une alimentation diversifiée et équilibrée garantit les besoins en vitamines et nutriments de la population.

FAUX. En raison d’une industrialisation des denrées alimentaires, l’alimentation moderne se caractérise par :

- une baisse micro-nutritionnelle de sa composition. Concrètement, cela se traduit par une augmentation de la densité énergétique et un appauvrissement de la densité nutritionnelle. C’est ce qu’on appelle « le phénomène des calories vides ». Les premiers aliments concernés sont les fruits et légumes (cueillis avant maturité) et les produits céréaliers.
- un changement de la composition de la nutrition animale. Il y a trente ans, on nourrissait le bétail avec des graines de lin et de l’herbe, riches en oméga 3. Aujourd’hui, on lui donne du maïs et du soja, ce qui a entraîné un changement de la composition en acides gras de son lait et des produits dérivés comme le fromage. Or la communauté scientifique a démontré l’importance du rapport oméga 6 /oméga 3 dans l’alimentation en matière de prévention des maladies cardio-vasculaires. C’est pourquoi les recommandations officielles qui plaident en faveur d’un meilleur équilibre sont nécessaires mais loin d’être suffisantes.

Un déficit en antioxydants participe au vieillissement prématuré.

VRAI. Le vieillissement est la conséquence d’un stress oxydatif. On le définit par la différence entre la production de radicaux libres par l’organisme et la capacité de ce dernier à les neutraliser. Notre ligne de défense face à ces « agresseurs » repose sur deux terrains :

-  Génétique => la capacité de notre organisme à produire des antioxydants, dont l’action est de « piéger » les radicaux libres.
-  Alimentaire => Un apport nutritionnel riche en vitamines (A,C,E), flavonoïdes et oligo-éléments (zinc, sélénium). En quantité faible dans nos assiettes, ces nutriments peuvent être pris sous forme de compléments alimentaires, lesquels vont participer au métabolisme de neutralisation des radicaux libres.

Le béta-carotène entraîne une augmentation du risque de cancer chez les fumeurs et anciens fumeurs.

FAUX. Il y a dix ans, deux études* ont démontré que la prise excessive de beta-carotène entraînait une augmentation du risque du cancer des poumons chez les fumeurs et anciens fumeurs. Mais aujourd’hui ces résultats sont repris partiellement par certains « détracteurs » pour en dénoncer la dangerosité. C’est pourquoi une lecture sage s’impose : pris à des doses nutritionnelles, il protège du cancer. Les doses excessives, sont, quant à elles, à proscrire.

*(Caret et ATBC)

Avant toute complémentation, l’avis d’un médecin est indispensable.

VRAI. La prise des compléments alimentaires n’est pas neutre. Pris à fortes doses et/ou cumulés, ils peuvent avoir des effets nocifs pour la santé. C’est pourquoi il est important de consulter un spécialiste qui mesurera les besoins de chacun. Résultant de l’interaction entre notre patrimoine génétique (capacité de l’organisme à tolérer et assimiler un aliment) et les aliments que l’on consomme, les besoins sont très difficiles à identifier. Leur évaluation (et non pas estimation !) nécessite des outils et des compétences précises. Pourtant au grand dam de la communauté scientifique, certains compléments fortement dosés sont en vente libre.

Définition compléments alimentaires
« On entend pas compléments alimentaires, les denrées alimentaires dont le but est de compléter le régime alimentaire normal et qui constituent une source concentrée de nutriments ou d’autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique seuls ou combinés, commercialisées sous forme de doses destinées à être prises en unités mesurées de faible quantité. » Directive européenne 2002/46/CE art2n reprise dans le décret 2006-352, publié au Journal Officiel de la République française le 20 mars 2006

A lire

En bonne santé grâce à la micronutrition, Dr Didier Chos et Laetitia Agullo, mai 2014, Albin Michel

Tous gros demain, Pierre Weil, Plon

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